Les enfants ne sont puissants que des droits et du pouvoir que nous leur donnons. Ce sont des êtres en demande de grandir et de se construire. Ils ne sont pas nos adversaires. Mais si nous ne savons plus comment les motiver à grandir et à s’élever, alors que nous reste-il à nous, les adultes ?
Sommes-nous à ce point déçus de notre propre monde, que nous ayons baissé les bras et proposons de leur laisser le champ libre ? Sommes-nous à ce point redevenus infantiles au point de croire qu’ils vont, seuls, trouver les clés d’un monde qu’ils découvrent et nous montrer eux-mêmes le chemin que nous devons suivre pour les aider ?
Si la réponse est oui, nous sommes alors en pleine déroute et on peut comprendre que le modèle que nous leur offrons n’ait rien de motivant à leurs yeux… Enseignants et parents se doivent, main dans la main, d’œuvrer ensemble et cesser de se renvoyer une culpabilité, que d’ailleurs ni les uns, ni les autres, ne semblent plus vouloir endosser. Il n’est pas tant de coupables à rechercher, que de solutions à trouver, et vite, si nous ne voulons pas compromettre plus avant, l’avenir de nos enfants et adolescents d’aujourd’hui.
Quel est le rôle des parents dans la scolarité de leur enfant ?
Il n’est jamais trop tard, et dans l’enfance tout peut aller toujours si vite !
Un parent insécure perd instantanément sa crédibilité aux yeux de l’enfant qui dépend de lui. Les sources de cette insécurité sont le plus souvent en grande partie sociales : la précarité professionnelle ou financière, la perte des repères sociaux, le déplacement des curseurs éducatifs et moraux… Tout cela constitue un terreau suffisamment riche à déstabiliser le fragile équilibre sur lequel nous tentons de nous construire nous-mêmes. Comment dans ces conditions, parvenir à transmettre à nos enfants la confiance nécessaire, afin qu’ils se consacrent, paisiblement, à leur propre construction ? Nous fabriquons, bien malgré nous, des combattants, dont l’objectif inconscient est de trouver pour nous, les clés d’un monde qui semble nous échapper…
Pleins, de l’insécurité qu’ils ressentent, face à notre propre fragilité et au nom de l’amour qu’ils nous portent, nos enfants n’hésitent alors pas à braver ce monde incompréhensible. S’agitant de tous côtés, s’épuisant inutilement, ne sachant plus vraiment où se trouve leur propre intérêt, ils tentent donc, seuls, au péril de leur avenir, de nous aider à tenir debout…
L’inutilité de leurs gesticulations ajoutées à l’ineptie de leur quête, finissent par accentuer leur colère à notre égard. Ils ne peuvent alors que la retourner contre eux-mêmes afin de ne pas « tuer » le père ou la mère que nous sommes. Hypothéquant ainsi leurs études, leurs investissements philosophiques ou spirituels qui pourtant, devraient être au fait de leurs intérêts et de leur désir de s’accomplir. Ils s’éteignent ainsi, peu à peu, courbant l’échine, à l’instar des modèles que nous sommes à leurs yeux.
Devenus incapables de les motiver à accéder à la pauvre excellence et la triste beauté de ce monde que nous leur proposons, nos enfants se détournent progressivement de cette affligeante lumière dont nous éclairons leur avenir et tentent de se bâtir un autre monde, pas nécessairement meilleur, mais bien à eux…
Comme nous avons perdu confiance dans l’idée que c’est collectivement que l’on pourra trouver notre « salut », c’est donc seuls et dépourvus, au sein de nos familles, que nous tentons désespérément de trouver les clés magiques d’une réussite individuelle, pour nous-mêmes ou nos enfants. Nous sommes bien isolés aujourd’hui, face à une mondialisation qui n’a pour effet que d’exacerber nos individualismes, tant nous avons peur… Nous nous recroquevillons lentement sur les reliefs des acquis d’une époque qui n’est plus. Terrorisés de tout perdre, nous nous y accrochons, et nous les défendons, tel un chien son os, ne voyant même pas qu’il n’y a plus rien à en tirer… « Hyper-vigilance, agressivité et individualisme » est désormais notre devise.
Le seul Autre qui existe dès lors à nos yeux, c’est notre enfant. Il est notre seul ami, notre seul espoir. Et pourtant, celui-ci se comporte comme s’il était devenu, lui aussi, notre adversaire. Il nous défie de plus en plus jeune et de plus en plus violemment…
Que faire dans ces conditions ? Qu’espérer ?